Au siège de la Banque de développement des Etats de l’Afrique centrale à Brazzaville, le patron des lieux, l’équato-guinéen Fortunato-Ofa Mbo Nchama, travaille souvant tard en soirée. Ce grand artificier de la BDEAC réformée et hautement compétitive, la mine toujours égaillée, reçoit une équipe de la télévision panafricaine, Afrique Média à son cabinet du 05e étage ; dans un édifice amblematique qui subit, lui-aussi, une profonde transformation a coup de marteau piqueur et de ronflements de bétonnières.
Le décor planté dans l’immensité de son bureau, Fortunato-OFA Mbo Nchama est à l’aise face aux questions du média, venu l’interviewer sur les grands défis du financement des projets intégrateurs et la relance de la croissance, en pleine crise sanitaire mondiale liée au Covid-19.
Répondant à une question directe de la chaîne, souhaitant faire le point sur les capacités de financement de la Banque et les perspectives d’accroissement de celles-ci, Fortunato-OFA Mbo répondra qu’il poursuit une meilleure opérationnalisation de la stratégie de mobilisation des ressources qui vise tant les moyens de la sous-région que ceux du monde entier.
C’est ainsi qu’il annonce le lancement, sous peu, de la deuxième phase de l’emprunt obligataire triennal, de 300 milliards de FCFA, approuvé en 2020 par l’Assemblée générale , qui s’inscrivait en droite ligne de la stratégie de mobilisation des ressources pour la satisfaction en temps réel des appels de fonds. « Nous avons réalisé avec beaucoup de succès une première phase de 100 milliards FCFA en 2020. Effectivement, pour cette année 2021, nous sommes déjà en train de travailler sur la 2e phase, qui portera aussi sur 100 milliards de FCFA », déclare Fortunato-Ofa Mbo Nchama.
L’équato-guinéen évoque une explosion des demandes de financements des Etats et des privés, depuis la transformation structurelle de la Banque, avec le crédit dont elle jouit aujourd’hui auprès de nombreux bailleurs de fonds internationaux comme la Banque européenne d’investissement(BEI).
« Nous nous rendons compte que les sollicitations augmentent, de façon exponentielle, non seulement pour les Etats, mais aussi pour le secteur privé. Vu notre notoriété, nous n’avons plus le droit de ne plus répondre à ces sollicitations. C’est pour cela que nous allons continuer à mobiliser les ressources », martèle Fortunato-OFA Mbo Nchama.
Poursuite du financement des projets intégrateurs
Faisant suite aux engagements pris à Paris lors de la table ronde des investisseurs de la CEMAC, la Banque mettait, le 16 août dernier, 32,8 milliards de FCFA à la disposition du Congo pour l’aménagement de 93 km de route entre Dolisie et Kibangou qui constitue la première phase du projet d’aménagement de la route Ndendé-Doussala-Dolisie du corridor Libreville-Brazzaville. Avec 36,7 % des engagements de financement de l’enveloppe globale promise par les bailleurs, la Banque et ses partenaires ont en une seule année mis à disposition déjà 36,7% des capitaux promis ; et indispensables à la concrétisation de cette haute vision des chefs d’Etats de la CEMAC. « La Banque s’était engagée à injecter seule déjà plus de 308 milliards de FCFA. Moins d’un an plus tard, la BDEAC a déjà approuvé les financements des projets intégrateurs pour pratiquement la moitié. Pour être exacte, pour 49% des engagements qui avaient été annoncés à Paris », précise le patron de la Banque.
Aucune concurrence aux Etats dans les emprunts obligataires
Au moment où la BDEAC annonce la deuxième phase de son emprunt obligataire, de nombreux Etats de la CEMAC sollicitent ce mécanisme dans les financements budgétaires. Le Congo et le Gabon viennent d’ailleurs de mobiliser, respectivement 113 milliards et 188 milliards de FCFA. Dans celle dynamique, Fortunato-OFA Mbo Nchama tient à rassurer. Il précise qu’il ne s’agit pas de concurrence aux États, mais de financement du développement. « La BDEAC n’est pas dans une logistique concurrentielle avec les l’États. Les sollicitations des Etats vont parfois au-delà de ce qu’ils peuvent obtenir auprès de la BDEAC parce que nous avons quand même des ratios, des limites que nous devons respecter. Nous nous focalisons sur le financement des projets, mais les Etats ont d’autres besoins qui ne sont pas les projets de développement », déclare-t-il.
Pour ce qui est de la mobilisation rapide de cette nouvelle enveloppe de 100 milliards de FCFA, par appel public à l’épargne, la Banque sait compter sur son attractivité. « Nous restons convaincus de l’excellente qualité de notre signature, des garanties, et du rendement que nous offrons. Nous ne voyons donc ici aucune difficulté à concourir avec les Etats qui eux-mêmes nous ont donné mandat pour qu’on puisse aller sur ce marché financier de l’Afrique centrale », ajoute Fortunato-OFA Mbo Nchama.
« Nous pensons que les investisseurs trouveront de meilleures conditions dans cet emprunt obligataire de la BDEAC. Et nous pensons que toutes les offres ont leur place dans ce marché communautaire et que les réponses vont être fonction des critères des investisseurs », tient-il à ajouter.
Pour le plein succès de cette seconde phase, Fortunato-OFA Mbo Nchama promet le renforcement de l’inclusion financière à travers un nouveau pourcentage de souscription dédier aux personnes physiques exclusivement, ainsi qu’une meilleure rentabilité, le tout dans une sécurité garantie. Il invite au passage les ressortissants de la diaspora à souscrire massivement, le moment venu, afin de » bâtir une base solide pour leur retour dans leurs pays d’origine », déclare-t-il.
« Nous ne pouvons que dire à nos concitoyens, à nos investisseurs aux institutions financières de se tenir prêt déjà pour le mois de septembre prochain. Nous allons lancer cette opération. Qu’ils soient déjà préparés. Et pour les personnes morales qui doivent obtenir des autorisations préalables, nous leurs suggérons de le faire dès à présent. Car l’année dernière, plusieurs investisseurs institutionnels avaient besoin de temps pour convaincre leurs conseils d’administration pour les autorisation nécessaires », déclare-t-il
La BDEAC annonce également qu’elle poursuivra les mobilisations internationales de ressources toujours pour mieux répondre aux besoins de financement. « Le fait de lancer des appels publics à l’épargne au niveau de la sous-région, c’est aussi pour donner du dynamisme à notre marché. Nous en avons besoin et c’est l’un de nos objectifs dans notre plan stratégique » précise Fortunato-OFA Mbo Nchama.
Avec Courrier Confidentiel